Aristide Cavaillé-Coll
1811 - 1899

Facteur de grandes orgues

Aristide Cavaillé-Coll voit le jour à Montpellier en 1811.

Il appartient à une famille dont les ancêtres tisserands s'étaient installés à Gaillac, dans le Tarn, vers 1700.
Son père Dominique Cavaillé-Coll est facteur d'orgue comme l'ont été son grand père Jean-Pierre Cavaillé.
(qui épousera en 1767 Maria-Francesca Coll, mariage qui sera à l'origine du patronyme composé "Cavaillé-Coll" selon la tradition espagnole)
Un de ses arrières grand-oncle, Joseph Cavaillé, fut également facteur d'orgues et travailla auprès du facteur Isnard.

Dominique Cavaillé-Coll avait épousé Jeanne Autard en 1810. De cet amour était déjà né en 1808 son frère Vincent.

Dominique Cavaillé-Coll
(1771 - 1862)
le père de Vincent et d'Aristide.



1815 : Fin du Ier Empire, début de la Restauration : Louis XVIII puis Charles X, rois de France.


La famille Cavaillé-Coll se fixe à Toulouse en 1827. Cette ville va offrir à Vincent et Aristide un enseignement scolaire mieux structuré.
Jusque-là les deux enfants et leur mère suivaient leur père, tantôt en France, tantôt en Espagne, au gré des différents chantiers.
Après leurs études, les deux fils suivent les pas de leur père et apprennent avec lui la facture d'orgue.

En 1829 les Cavaillé-Coll inventent un instrument au nom original : le Poïkilorgue encore appelé : « Orgue varié expressif ».


Un poïkilorgue
réalisé par les ateliers Cavaillé-Coll et Fils.


Il s'agit d’un ancêtre de l'harmonium (dont le créateur Alexandre Debain ne déposera le brevet qu’en 1842).
Le poïkilorgue est un instrument à vent, alimenté par deux soufflets que le musicien actionne avec les pieds à l'aide de pédales.
Il est doté d'un clavier de 54 notes et le son est produit par la vibration d'anches libres ce qui permet une grande expression sonore
suivant la force du vent qui traverse les anches. (En grec poïkilos signifie varié, changeant).

Entre 1829 et 1831 Dominique Cavaillé-Coll reconstruit l'orgue de la collégiale de Saint-Gaudens, détruit à la Révolution.


 

1830 : Révolution des "Trois Glorieuses" : fin de la Restauration.
Début de la Monarchie de Juillet, Louis-Philippe, roi des Français.


Rossini, de passage à Toulouse en 1832, se rendra chez les Cavaillé-Coll pour essayer des poïkilorgues et leur suggérera de « monter » à Paris.
En 1833 Aristide se fait remarquer par l'Académie des Sciences, Inscriptions et Belles Lettres, pour l'invention d'une première scie circulaire.
Les affaires n’étant pas fameuses dans le midi de la France, la famille décide de suivre la recommandation de Rossini.

Le voyage s'organise et, munis de lettres d'introduction auprès de personnes éminentes, les Cavaillé-Coll arrivent à Paris et logent quai Voltaire.
Aristide prend rapidement connaissance de l’appel d’offre lancé par le Ministère des Travaux Publics
pour la construction d’un Grand Orgue neuf à l’Abbatiale de Saint-Denis.
Il rédige aussitôt son projet, le présente et emporte le marché face à quatre concurrents dont la réputation est pourtant bien établie :
John Abbey, Louis Callinet, Louis-Paul Dallery et Pierre Erard.

Peu après Aristide achète une scie circulaire "Aux Forges de Vulcain", une maison spécialisée dans les outillages.
Il la perfectionne pour l'usage qu'il veut en avoir afin d'accélérer la fabrication des poïkilorgues.
Cette réalisation sera saluée par la Société d'Encouragement à l'Industrie Nationale (S.E.I.N.)
qui compte parmi ses membres des scientifiques de renom, des hauts-fonctionnaires et des personnalités influentes.
Toutes ces relations nouées au fil des années auront leur part dans l'ascension d'Aristide Cavaillé-Coll
que son génie seul n'aurait pu hisser au sommet de son art.

Les travaux à Saint-Denis débutent en Janvier 1834 mais, à la suite de nombreux problèmes à résoudre,
l'inauguration n'aura lieu qu'en Septembre 1841.

Le buffet néo-gothique de
la cathédrale de Saint-Denis
dessiné par François Debret (1777-1850)
Architecte-en-Chef de la basilique.

Plaque de fabrique
apposée au dessus des claviers.


Cette réalisation sera pour Aristide Cavaillé-Coll une consécration qui lui ouvrira les portes de la notoriété et du succès.
Il y a dans ce premier instrument tout ce qui fera le génie de son créateur : un souci de synthèse avec l'œuvre de ses prédécesseurs,
une accumulation de découvertes mécaniques et pneumatiques (première utilisation de la machine Barker)
et surtout la qualité étonnante de la réalisation matérielle.
Avec chaque instrument Cavaillé-Coll apparaîtra comme un novateur, il confirmera chantier après chantier sa compétence
et son savoir-faire exceptionnel qui feront de lui le plus grand facteur d'orgues français du XIXème siècle.

En 1834 les Cavaillé-Coll s'installent dans de nouveaux ateliers.
L' un rue de Laval et l'autre rue Notre-Dame-de-Lorette où sont confectionnés les Poïkilorgues .


Aristide Cavaillé-Coll
vers 1836

Fin 1842 ils sont à la recherche de locaux plus spacieux pour pouvoir développer leur entreprise.
Il déménagent alors dans un immeuble à l’angle des rues Pigalle et La Rochefoucault.


1848 : Révolution de Février, chute de la Monarchie de Juillet.
Début de la Seconde République : Louis-Napoléon Bonaparte, président de la République.


Décembre 1852 : Début du Second Empire.
Napoléon III, empereur des Français.


En février 1854 Aristide Cavaillé-Coll épouse Adèle Blanc (1828-1868). Dans sa courte vie, Adèle lui donnera 7 enfants dont 4 seulement survivront.
En avril les ateliers doivent à nouveau déménager et partir de l’autre côté de la Seine, rue de Vaugirard,
car les locaux de la rue Pigale ont été mis en vente et les Cavaillé-Coll n'ont pas eu les moyens financiers pour les racheter.
La fin de l'année 1854 voit la naissance de leur premier enfant, Cécile (1854-1944) qui restera auprès de son père toute sa vie durant.

En 1856 naissance de Pierre (1856-1859), décédé à 3 ans de laryngite suffocante.

En 1858 naissance d’Isabelle (1858-1859), morte à 8 mois de la même maladie.

En 1860 naissance d’Emmanuel (1860-1922) qui sera décorateur et professeur d’arts décoratifs.

En 1862 naissance de Joseph (1862-1884) mort de maladie pendant son service militaire au Tonkin.
La même année 1862 voit le décès de son père Dominique à 91 ans.

En 1864 naissance de Gabriel (1864-1916) qui sera un temps facteur d’orgues puis partira en Espagne comme ingénieur dans les mines de charbon.


Aristide Cavaillé-Coll vers 1855

Le 10 octobre 1868 Cavaillé-Coll achète un terrain Avenue du Maine.
Il y fait édifier un hôtel particulier, témoignage de sa réussite, ainsi que de nouveaux ateliers dont un grand hall d’exposition.
Le 20 octobre sa femme Adèle meurt, au lendemain de la naissance de leur septième enfant, né sans vie.

En janvier et février 1870 se déroulent les tractations entre Cavaillé-Coll
et le Conseil de Fabrique de l'église de Bagnères-de-Luchon pour l'achat un nouvel instrument.

Le 19 juillet la France déclare la guerre à la Prusse : mécaniciens, harmonistes et ouvriers sont mobilisés. Le travail s’arrête.
Le 30 juillet, inauguration de l'orgue de Luchon par Ignace Leybach, titulaire du Cavaillé-Coll (1852) de la cathédrale de Toulouse qui déclarera :
« Les instruments de Monsieur Cavaillé-Coll sont de véritables chef-d’œuvre qui ne laissent rien à désirer ».



Le 4 septembre 1870 : chute du Second Empire, proclamation de la Troisième République.
Début du siège de Paris.  Adolphe Thiers premier président de la Troisème République.



Dans une capitale assiègée et de plus en plus affamée, l’hiver 1870-1871 est extrêmement rigoureux.
Aristide doit se résoudre à brûler son beau bois sans nœuds pour se chauffer.
Dans les ateliers déserts, sont logés une centaine de gardes mobiles.


A. Cavaillé-Coll vers 1875

Après la guerre, le travail reprend et les commandes sont à nouveau nombreuses mais la situation financière de l’entreprise est toujours en équilibre précaire.
Sept emprunts pour un total de 700.000 francs seront nécessaires à Cavaillé-Coll pour stabiliser son entreprise entre 1869 et 1887.
Il faut en effet approvisionner régulièrement les stocks en bois et en métaux,
payer un personnel nombreux et bien souvent livrer au plus juste prix des instruments remarquables.
La renommée de la maison Cavaillé-Coll est certes bien établie,
Aristide reçoit pour le fruit de son génie et de son travail acharné de nombreuses récompenses, médailles et décorations,
mais tout cela se fait au prix d’une course perpétuelle à l’emprunt et au crédit.

Plus de 500 instruments sortiront de la manufacture Cavailllé-Coll et se trouveront répartis à travers le monde entier.
Pour la seule ville de Paris on en dénombre 55. Il y en a plus de 300 dans les diverses cathédrales ou églises de France.
La liste des autres pays qui accueillent des Cavaillé-Coll semble sans fin :
Angleterre, Belgique, Bolivie, Brésil, Canada, Chili, Chine, Colombie, Costa-Rica, Cuba, Danemark,
Espagne, Etats-Unis, Haïti, Hollande, Inde, Indochine, Italie, Mexique, Pérou, Portugal, Roumanie, Suisse.

Son frère Vincent meurt en 1886 à l'âge de 78 ans.

En 1892 les emprunts sont devenus trop lourds à rembourser et la liquidation judiciaire est inévitable à court terme.
En 1893 Aristide et sa fille Cécile doivent quitter leur hôtel particulier qui est frappé d’adjudication.
Ils vont se reloger dans un petit appartement rue du Vieux-Colombier.
La liquidation judiciaire suit mais Cavaillé-Coll obtient de ses créanciers un répit pour lui permettre d’organiser sa succession.


Celle-ci sera assurée par Charles Mutin (1861-1931), un ancien de la maison entré comme apprenti en 1875 et installé à Caen depuis dix ans.
Avec lui travaillent beaucoup d'anciens employés que la Manufacture Cavaillé-Coll n'a pas pu garder.
Mutin réunit les fonds nécessaires et reprend l'entreprise en juin 1898 sous le nom : Mutin Cavaillé-Coll.


Charles MUTIN
1861 - 1931

Aristide Cavaillé-Coll meurt paisiblement dans son appartement parisien, aux côtés de sa fille Cécile,
au matin du vendredi 13 octobre 1899. Il avait 88 ans.

Il est inhumé dans le caveau familial au cimetière du Montparnasse, à Paris.

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